Tour d’horizon des carabines « linéaires »

Tour d’horizon des carabines « linéaires »

Rares sont les fabricants qui n’ont pas cédé à la mode des carabines linéaires qui connaissent actuellement un incroyable succès, grâce à leur vitesse de réarmement.

Pour beaucoup, d’utilisateurs les « linéaires » sont nées avec la BLASER R93. En fait, les systèmes de réarmement par culasse à action rectiligne apparaissent vers 1880 en Autriche. La Suisse, les États-Unis et le Canada suivent. Puis, viendront la BROWNING T-Bolt en 1964 et de nombreuses carabines de biathlon. La ligne droite étant le chemin le plus court et, parfois, le plus rapide pour aller d’un point à un autre, on voit depuis 30 ans émerger une multitude de carabines à réarmement linéaire. La vitesse de réarmement est devenue l’argument de vente.

BLASER R93 : ELLE A OUVERT LA BRÈCHE

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La R93 n’a pas été de prime abord pensée pour nos battues, mais pour être une carabine universelle.

Dans le début des années 90, chez BLASER, Gerhardt BLENK rêve d’une carabine moderne, modulaire, universelle, facile à démonter, pouvant s’adapter à tous les culots. Afin d’améliorer l’efficacité, il veut gagner du temps sur le réarmement. Menrad ZEH se met au boulot. Pour répondre au cahier de charges, il conçoit une culasse inédite dont la tête démontable se verrouille dans l’extension de canon selon le principe de multiples verrous radiaux. Lorsque la tête de culasse arrive en butée contre la chambre, les multiples tenons en corolle se verrouillent. La course du transporteur de culasse est rectiligne.

L’armeur séparé permet le port avec une cartouche chambrée en sécurité. La R93 se distingue par l’absence de boîtier. Le châssis sur lequel se visse le canon supporte le transporteur de culasse qui coulisse sur ses rails. À sa sortie, la forme inédite, l’absence de boîtier et l’usage d’alliage ne sont pas bien reçus. Un formidable et très intelligent marketing va l’imposer. Voulue comme carabine universelle, elle va gagner ses lettres de noblesse françaises en battue en raison de sa vitesse de tir. La France sera le second marché après l’Allemagne. La R93 sera produite jusqu’en 2016. Elle modifie durablement l’image de l’arme de chasse et lance la mode du linéaire.

PIRKAN LYNX 94 : ORIGINALE ET MÉCONNUE

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Peu connue mais originale, fiable et increvable : la PIRKAN Lynx 94 et son verrou transversal.

La Lynx 94 est fabriquée en Finlande. Conçue pour les compétitions de tir nordique, elle offre un réarmement très rapide et une grande précision.

Le boîtier de culasse cylindrique est surdimensionné. Ses flancs au premier quart arrière sont usinés pour le passage du verrou transversal. Le groupe de verrouillage et de percussion ne comporte que 5 pièces. Au premier tiers arrière de la culasse, on trouve le verrou transversal monobloc qui fait penser à un verrou de coffre fort. Le déverrouillage est commandé par un levier en T proche. Se déplaçant selon un angle de 20°, il facilite l’extraction primaire, autorise le déverrouillage et arme le percuteur. L’alimentation se fait par l’intermédiaire d’un chargeur amovible de 3, 4 ou 10 cartouches. La détente est une pièce de précision digne d’une carabine de match, directe elle offre un poids de départ réglable de 0,5 à 1,2 kg. La Lynx est originale, fiable, efficace.

HEYM SR 30 : UNE CLASSIQUE AU VERROUILLAGE INÉBRANLABLE

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HEYM SR 30 : une classique au verrouillage inébranlable.

En 1998, HEYM se réinstalle en Thuringe et Peter FORTNER développe un verrouillage original. Il dessine la SR30 qui est toujours fabriquée sans modification depuis. Un record de longévité. D’apparence classique, la culasse, un cylindre d’acier, contient un autre cylindre dont l’avant sert de rampe de blocage à six billes de 6,5 mm de diamètre. Concentriquement placées, elles forment les tenons de verrouillage. Une 7ème bille, en avant du levier d’armement, fait office de tenon de sécurité. Lors de la manœuvre du levier vers l’avant, une came pousse le cylindre repoussant les billes vers le haut. Elles prennent place dans le pont avant et sont bloquées par le cylindre. La 7ème bille est verrouillée par la pièce d’armement. Ce système a été testé jusqu’à plus de 10.600 bars. Le levier de culasse à 2 positions sert d’armeur séparé. En arrière, la culasse est bloquée, percuteur désarmé. En avant, il arme le percuteur, la SR30 est prête à tirer. La HEYM possède une sécurité supplémentaire, un poussoir transversal à l’arrière de la noix. Belle carabine au look classique, la SR30 mériterait plus qu’un succès d’estime.

AVANT LA ROSSLER TITAN 16 : IL A MANQUÉ PEU DE CHOSE À LA MAUSER 96

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La Titan 16 a corrigé les défauts des MAUSER 96/97. Elle est fiable et précise.

Milieu des années 90, le succès de la R93 force les fabricants à réagir. MAUSER tente de surfer sur la vague « linéaire » et sort la MAUSER 96. Une mécanique originale, des proportions bien adaptées à nos battues, un choix de calibres intéressants et un prix attractif devaient lui apporter le succès. Il n’en sera rien. Fabriquée à la hâte, la culasse à verrous multiples (16) souffre d’une fabrication bâclée, d’un choix de matériaux de mauvaise qualité (guides plastiques cassants). Elle connaît rapidement des problèmes de fonctionnement, voire de sécurité (départs intempestifs). Pourtant celles qui restent en service donnent entière satisfaction. En 2011, ROSSLER, qui a racheté les brevets de MAUSER, s’attelle à la 96. Fini les plastiques, les sécurités de percuteur et de fermeture sont revues. La Titan 16 devient ce qu’aurait dû être la 96, une arme fiable, précise, bien équilibrée. Disponible dans de nombreux calibres, l’acheteur peut choisir son modèle en utilisant le « configurateur Titan 16 » pour une arme sur mesure.

BLASER R8 : SORTIE EN 2008 ELLE TARDERA À PERCER EN FRANCE

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BLASER R8 : le bloc chargeur détente ôté, la carabine est en sécurité totale.
Attention à ne pas l’oublier ou le perdre…

En 2008, cela fait 15 ans que la R93 règne sans partage. Mais, comme tous les produits modernes dont le succès repose en partie sur l’image, la 93 vieillit. Des critiques apparaissent, des désirs aussi. Très réactif, BLASER sort la R8 qui ne possède aucune pièce commune avec la 93. Elle s’en démarque par son châssis à fond ouvert destiné à recevoir le bloc détente/chargeur mais conserve un look proche de la R93.

La culasse est considérablement modifiée et renforcée pour en augmenter la fiabilité et la sécurité. L’angle des verrous est recalculé, leur taille ainsi que la surface d’appui augmentée afin d’assurer une meilleure tenue aux pressions. La tête de culasse plus longue assure un meilleur guidage et tenue des grosses cartouches. La culasse se solidarise au transporteur grâce à un épais tenon. Lors de la fermeture, le levier poussé en avant commande deux verrous qui prennent appui sur l’arrière du châssis supprimant le risque d’arrachement. En France, la R8 va peiner à percer en raison d’un poids supérieur à celui de la 93. Depuis 2016, son succès est bien réel.

MERKEL HELIX : UNE VRAIE TAKE DOWN À BOÎTIER FERMÉ

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MERKEL Helix, ici une Speedster, du nom de sa crosse évoluée.

L’Helix a été conçue en tenant compte de l’expérience d’utilisateurs qui désiraient une culasse contenue dans le boîtier. Elle s’articule autour d’une « carcasse » en alliage qui englobe la mécanique. Le boîtier est prévu pour des munitions de longueur inférieure à 85 mm. Le verrouillage MERKEL désirait un système robuste, différent des concurrents. Le concepteur a retenu une tête de culasse rotative amovible à tenons multiples. L’Helix possède 6 tenons en trois rangs se verrouillant selon un mouvement hélicoïdal. Le boîtier court et la recherche d’une grande vitesse de réarmement crée un vrai casse tête technique. MERKEL a développé un système à crémaillère qui multiplie par deux le mouvement de la culasse. Elle parcourt 13 cm alors que le levier coulisse sur 6,5 cm. La manipulation est fluide. La culasse contenue dans le boîtier ne trouble pas le tireur qui garde les yeux sur le gibier. Depuis 2012, elle concurrence BLASER et la R8.

BROWNING MARAL : ELLE AURAIT DÛ EXISTER 15 ANS PLUS TÔT

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La Maral existe en gaucher intégral. Cette spécificité lui fait grignoter des parts de marché.

La Maral aurait pu voir le jour en 1998 à la place de l’Acera. Elle possède un système original qui en fait une linéaire à réarmement assisté. La culasse à 7 tenons, semblable à celle des Bar, conserve ses deux tiges de manœuvre. La Maral fait fi de l’emprunt des gaz, du tube adducteur, du ressort récupérateur et de sa tige guide. L’ensemble est remplacé par un enrouleur contenant un ressort plat. Ce système permet de réarmer la carabine en une seule opération. On tire la culasse pour éjecter l’étui et on lâche le levier. Entraînée par le ressort, la culasse extrait une cartouche du chargeur et la chambre. La main du chasseur est déjà prête à tirer. Le levier est renvoyé vers l’arrière pour une bonne ergonomie. La culasse contenue dans le boîtier ne perturbe pas la visée. L’armement par poussoir indépendant placé à l’arrière du boîtier permet d’offrir un départ plus léger et sécurise le transport cartouche chambrée.

CHAPUIS ROLS ET VERNEY-CARRON LINERGIE : LE RÉVEIL FRANÇAIS

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La Rols de CHAPUIS : les français se réveillent avec une belle carabine légère, élégante et originale.

La France a tardé à prendre le train des linéaires. En 2017, CHAPUIS entre en lice avec sa Rols, qui s’inspire de certains concepts éprouvés mais fait appel à un verrouillage vraiment unique et breveté : le CLS pour CHAPUIS Locking System®. À l’inverse des autres, le CLS positionne les verrous dans l’insert de canon. Activés par le déplacement d’un manchon actionné par le levier d’armement, 8 tenons basculant d’avant en arrière et verrouillent la tête de culasse.

Le CLS offre une importante surface de verrouillage de 260 mm², il subit des pressions de 8500 bars sans broncher. Sa conception interdit les départs intempestifs tant que le verrouillage n’est pas complet. Comme toujours chez CHAPUIS, les bois sont au-dessus de la moyenne. Une jolie carabine légère particulièrement la version Élégance, qui plus est « made in France ».

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La VERNEY-CARRON Linergie, arrivée en 2021, reprend à son compte le principe à succès de la « linéaire assistée ».
Une carabine bien équilibrée au réarmement très rapide.

En 2021, VERNEY-CARRON présente la Linergie qui reprend la mécanique de l’Impact sans l’emprunt des gaz ni le piston. Comme sur la Maral, le levier revient vers l’arrière au-dessus du pontet pour une prise en main rapide. Le ressort d’assistance est puissant mais souple. La manœuvre est très fluide, le réarmement d’une grande rapidité. Bien qu’il n’y ait pas d’armeur séparé, les départs sont bons. Un arrêtoir de culasse permet de bloquer la culasse en position arrière. Le chargeur contient 5 cartouches dans les calibres usuels. Le canon peut recevoir un modérateur ou un frein de bouche. À 1615€, la Linergie devrait prendre des parts à la Maral.

Ce petit tour d’horizon est terminé mais nous reviendrons sur les « linéaires » car d’autres modèles sont disponibles (STRASSER) ou arriveront en septembre (BERETTA, SAVAGE).