Le loup à la conquête de l’Ouest ?

Le loup à la conquête de l’Ouest ?

Depuis quelques semaines, voire quelques mois, le loup fait l’actualité. Entre polémique sur l’état réel de sa population et apparitions récurrentes dans des zones où il était absent, faisons le point sur une expansion inéluctable et les contrevérités qui l’accompagnent.

Depuis deux ans, la COVID-19 fait passer au second plan d’autres sujets sociétaux. Le loup et son expansion en faisait partie. Mais, ces dernières semaines, des témoignages nombreux dans des régions jusque-là exemptes de loups, et une polémique sur l’estimation des populations (624 pour l’Office Français de la Biodiversité) ont ramené le sujet sur le devant de la scène médiatique. Calvados, Indre-et-Loire, Vendée, Vienne, Loire-Atlantique, et maintenant l’Île-de-France, le loup, ces derniers mois a été vu en de nombreux lieux. Des endroits souvent éloignés du quart sud-est de la France et des Alpes, où il était officiellement cantonné depuis son retour officiel en France en 1992.

OBSERVÉ CES DERNIÈRES SEMAINES DANS L’OUEST ET L’ÎLE-DE-FRANCE

Le loup à la conquête de l’Ouest : photo 2
Le phénomène de dispersion, généralement à l’automne, amène de jeunes loups à étendre l’aire de présence de l’espèce.

Pourtant, ce ne devrait pas être une surprise puisque, depuis des années, l’espèce a franchi la ligne de démarcation figurée par une diagonale Pyrénées-Vosges, et entamé une véritable conquête de l’Ouest et du Nord. Le loup a, pour l’exemple, été observé, et des indices de présences ont été relevés, à de multiples reprises dans la Somme en 2017, et dans l’Aisne voisine. Le phénomène de dispersion est bien connu des naturalistes et amène de jeunes animaux chassés de leur meute à parcourir parfois des centaines de kilomètres depuis leur tanière de naissance.

UN EXPLORATEUR NÉ

Ces raids exploratoires aboutissent à terme à des installations plus durables. Ainsi, en novembre 2019, un loup a été observé en Normandie, en Seine-Maritime, après une absence de près de 130 ans. Pour l’anecdote, et par le plus grand des hasards, Jean-Marc MORICEAU, historien et grand spécialiste des relations homme-loup, sortait au moment un ouvrage sur l’histoire du loup en Normandie, ignorant totalement que l’un d’entre eux avait déjà croqué quelques chevreuils et brebis dans les près du pays de Bray.

Le loup à la conquête de l’Ouest : photo 3
Le livre historique de Jean-Marc MORICEAU devient d’une étonnante actualité avec le retour avéré du loup dans la région depuis novembre 2019.

UN RETOUR ACCOMPAGNÉ DE MENSONGES

S’il ignorait le retour du loup dans sa région, il était en revanche parfaitement au courant des manipulations orchestrées par les pro-loups fanatiques depuis des années. En raison de son travail universitaire sur la question, il battait en brèche un certain nombre de mensonges ou approximations volontaires de ces derniers. Dans son article du printemps dernier, Dominique CZERMANN listait cinq de ces contre-vérités destinées à présenter la présence du loup en France sous un jour uniquement positif :

  • Avant sa réapparition en France via l’Italie et le Mercantour en 1992, le loup est considéré comme espèce éteinte en France depuis 1937.
    Faux : de 1948 à 1990, au moins 28 loups seront abattus en France.
  • Le loup est arrivé chez nous de lui-même.
    Faux en partie : En 2005, le rapport parlementaire qui valide le retour naturel du loup évoque toutefois « la capture de loups sauvages italiens et leur transport en France » et note « Il est pour le moins surprenant que le Ministère de l’environnement ait officiellement recensé des lâchers clandestins. »
  • Le loup ne s’attaque pas à l’homme. Si des attaques ont eu lieu c’était soit des hybrides, soit des loups enragés.
    Faux : On recense plus de 9000 attaques du prédateur du XVIème au XIXème siècle en France, dont 5695 par des prédateurs sains contre 3308 enragés. Dans le monde moderne, on note 136 attaques mortelles entre 1912 et 1993, mais plus de 160 entre 1993 et 2015 !
  • Il n’y a qu’en France que les éleveurs et les chasseurs se plaignent du loup. En Europe, il est bien accepté partout.
    Faux : De la Suède au Portugal en passant par l’Espagne et l’Italie et même la Suisse, l’Autriche et l’Allemagne, la colère monte et gagne du terrain. Dans le paisible canton du Valais en Suisse, les éleveurs ont manifesté leur colère en déposant des carcasses de bétail devant le siège du WWF.
  • Les attaques sont dues aux chiens errants.
    Faux en majeure partie : Une étude de 2005 concernant la prédation sur les troupeaux du Luberon en l’absence du loup a établi un taux de prédation par les chiens errant de 0,25% par an, très loin des chiffres annoncés par les « pro-loups » entre 2 et 5%. Et quand le loup apparaît, les chiens errants disparaissent. Ce sont ses premières proies.
Le loup à la conquête de l’Ouest : photo 4
Il se passe souvent plusieurs années entre la première apparition d’un loup sur un territoire et la constitution d’une meute.

PARTOUT EN FRANCE

Ces manipulations empêchent l’opinion de se faire une idée éclairée sur le sujet. Plus que le nombre de loups qui fut l’objet d’une polémique ces dernières semaines entre un OFB qui ne dispose pas des moyens suffisants de suivi, et ceux qui relativisent le caractère bénéfique de ce retour, c’est l’expansion spatiale de l’espèce et son implantation durable qui est le véritable enjeu. Or, le loup a d’ores et déjà recolonisé la quasi-intégralité du territoire français comme l’atteste cette carte de l’observatoire du loup, un collectif indépendant réunissant de nombreux spécialistes.

RÉPARTITION DU LOUP EN FRANCE AU 21 NOVEMBRE 2021

Datant du 21 novembre, cette carte ne prends pas en compte l’observation confirmée d’un loup en Indre-et-Loire, ce qui signifie désormais que l’animal a été observé dans tous les départements de France métropolitaine, à l’exception de la Corse. En dépit des tirs de régulation autorisés, le loup poursuit son inexorable progression. De retour, il y a officiellement trente ans en France, il ne serait pas étonnant qu’il mette moins de temps pour s’établir vraiment sur l’ensemble du territoire.

Le loup à la conquête de l’Ouest : photo 5
Absence certaine
Passage possible
Zone de dispersion avant de s’établir (observations avérées, présence de 1 individu au moins)
Départements où le loup est établi