La saga BARDOU, Ep.1 : la passion du tir en héritage

La saga BARDOU, Ep.1 : la passion du tir en héritage

AIR & NATURE consacre à cette famille une série de portraits. La particularité des BARDOU est de combiner la passion de la chasse à celle du Ball-Trap de compétition au plus haut niveau. Nous les avons rencontrés en Sologne dans le fief de Charles BARDOU. Il est l’un des champions français parmi les plus titrés, tous sports confondus.

Ce matin, en quittant Paris par le sud en direction de la Sologne, nous choisissons un chemin de traverse. Les rayons d’un soleil annonciateur des grandes vacances dardent les marronniers et les cèdres séculaires du bois du Boulogne. Sur la droite, un petit pavillon entraperçu se souvient d’avoir été l’écho, depuis le XIXème siècle, des coups de fusils du Tir aux Pigeons de Paris. Même si, avant la fin récente des tirs, les hélices avaient remplacé les pigeons vivants. À cet instant, nous venions de pénétrer la pointe du triangle d’or où le tir sportif au fusil de chasse fut porté sur les fonts baptismaux.

Voici la Seine. Non loin, la base de ce triangle s’achèvera au cours de la première décennie du XXe siècle. Quand sera, d’abord, érigée au Tir aux Pigeons de l’île Seguin, à Boulogne-Billancourt, la première tour de Ball-Trap en France – haute de 16 mètres. Enfin, en 1909, moins d’une lieue en direction de l’est, à Issy-les-Moulineaux, Paul GASTINNE-RENETTE inaugure le premier parcours de chasse continental qu’il nomme : son « sentier de chasse ».

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Martine et Didier, entourant leur fils aîné David, sont les premiers supporters de cette fratrie de champions.

À cette époque, les fondations qui venaient d’être posées verront naître au fil du temps les disciplines sportives de tir au fusil de chasse. Citons le parcours de chasse et le Compak Sporting, si chers à la famille BARDOU. Tout à l’heure, nous avons rendez-vous avec elle. A commencer par Didier et Martine BARDOU, les parents et premiers supporters de David le grand frère, et de Charles – né en 1982 – de dix ans son cadet. Le prochain volet de cette série de portraits consacrera Martine et Didier. Leur Ball-Trap, Les Bruyères de Tours (Indre-et-Loire), là où tout a commencé, fêtera bientôt son demi-siècle d’existence.

Petit aparté : en France, la Fédération Française de Ball-Trap et de Tir à Balle (FFBT), gère 7 disciplines différentes.

L’esprit alanguit par la monotonie des grandes plaines autour d’Artenay, doublé du rêve des ouvertures aux mille perdreaux gris d’autrefois, le voyage vers Lamotte-Beuvron parut rapide. Lorsqu’un panneau à droite de la petite route solognote indique : « Sologne Shooting Club ». Non loin, une affiche « Euro Shooting Cash le 26 juin 2021 », rappelle la sixième édition d’un évènement qui venait d’avoir lieu, ici, le week-end précédent. Mis en place par Benjamin TRANCHANT, le fondateur des Shooting Club à la fin des années 2000, et secondé par Charles BARDOU, le principe de cette compétition permet de rétribuer les participants. Leur perspective d’un bon classement encourage alors les tireurs du monde entier à venir croiser le fer en Sologne. Entre eux, s’ensuit une émulation digne d’un championnat mondial doublé d’un spectacle de première qualité.

Charles BARDOU est le directeur du Sologne Shooting Club. Chronologiquement, ce club est le deuxième parmi cinq à ce jour.

Preuve de l’engouement pour le Ball-Trap, bien que nous soyons aujourd’hui vendredi, la grande terrasse du club-house de Courgenou grouille de monde. Les tireurs et leurs familles profitent du soleil pour se restaurer à l’air libre. Depuis l’une des tables, une voix nous interpelle ; aussitôt nous reconnaissons David BARDOU. Il est attablé autour des sept membres de sa famille en âge de tenir une arme de chasse : Martine et Didier ses parents ; Angèle 16 ans et Juliette 14 ans, ses filles cadettes ; Charles BARDOU, son frère, est accompagné d’Hugo, son fils aîné de 12 ans. Et seule la fille aînée de David, Victoire – 20 ans – manque à l’appel, retenue à Toulouse par ses études.

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Chez les BARDOU, dès que l’âge le permet, tous savent tenir un fusil.

Bel hommage du maître des lieux à son grand frère, Charles nous dira : « David a été mon exemple, quand j’avais quinze ans il en avait vingt-cinq, c’est lui qui m’emmenait tirer partout. Il m’engueulait, parfois même je pleurais. Mais, fort de son expérience, il m’a évité de refaire ses erreurs. Il m’a surtout enseigné, ce qui est essentiel, c’est à dire la gestion mentale de la compétition. » Parmi tant de titres, Charles BARDOU compte celui de champion du monde junior de parcours de chasse, assortis de 4 titres de champion du monde de Compak Sporting.

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Parmi les nombreux trophées remportés par Charles, notons 4 titres de champions du monde de Compak Sporting, comme ici en 2007 au Portugal.

Si dans l’esprit de beaucoup de compétiteurs, la dernière victoire est souvent la plus belle, le dernier titre mondial de Charles BARDOU conquis en Hongrie face à un Russe en 2019, occupe une place à la saveur particulière. Quinzième le premier soir avec un score de 47 plateaux sur 50 – ce chiffre à lui seul exprime la difficulté du sport de haut niveau ; tout semblait « perdu fors l’honneur », selon l’expression du bâtisseur de Chambord. Pourtant, Charles poursuivra la compétition par un superbe 149/150 ! Finalement, il reconquerra, en barrage, son titre mondial remporté à Signes dans le Midi en 2017 ; puis perdu l’année suivante en Italie. Mais, cette année-là, la compagnie aérienne chargée de le transporter avait égaré son fusil !

En partageant avec des champions de cette trempe, on comprend qu’il est bien difficile de s’identifier à eux. Quand on pose à Charles la question de sa motivation, un verbe jaillit, un simple infinitif : « gagner ! » Comme si finalement le tir de haut niveau servait de prétexte à assouvir une passion supérieure… pour laquelle seule compte la victoire. On flaire que l’on naît champion, quel que soit le sport, on ne le devient pas. Charles nous expliquera que pour assouvir son talent, s’il avait à choisir entre les deux, il choisirait le tir de compétition à la chasse, sa seconde grande passion.

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Un événement réunissant les deux frères David et Charles, champions du monde 2014 de Parcours de Chasse par équipe, en compagnie d’Alain GENDREAU et Christophe AUVRET.

Pourtant, si le tir de haut niveau est avant tout un sport individuel, il se conjugue parfois au pluriel pour offrir à une famille un impérissable souvenir collectif. Sans doute même, le plus beau souvenir parce qu’il unit David et Charles. Cet évènement s’est produit en 2014, avec « le titre de champion du monde de parcours de chasse par équipe, remporté pour la France par David et Charles BARDOU associés à Alain GENDREAU et Christophe AUVRET », rappelle Didier ému. À ce jour, ce titre est à reconquérir pour l’équipe de France…

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Bon sang ne saurait mentir et Angèle, la deuxième fille de David, a hérité la passion du tir et de la chasse…

En guise de conclusion à ces quelques lignes, offrons la parole à la troisième génération BARDOU, celle de la « relève » sous la forme d’un clin d’œil à deux merveilleux livres, ceux de René CHAMBE et de Romain GARY : Souvenir de chasse pour Angèle et La Promesse de l’aube d’Hugo.

Angèle 16 ans, deuxième fille de David : « Le jour de mon quinzième anniversaire papa m’a offert de l’accompagner à l’approche d’un cerf en Brenne chez un de ses amis. À Mézières, le lever du soleil sur les étangs m’est apparu comme une sorte de premier matin du monde. C’était tellement beau ! cette brume vaporeuse, ce rose… Bientôt, nous approchions une harde. En vrai, pour la première, je vivais ce que me racontait papa à chaque retour de chasse. Ce matin-là, le daguet recherché fut approché à bon vent. Il est finalement tombé au champ d’honneur, en animal libre, avant même d’entendre le coup de carabine. Depuis, mon rêve est de tirer un grand cerf entraperçu à la chasse chez Benjamin, comme celui-ci. » [À la cimaise du Sologne Shooting, Angèle désigne le superbe cerf – voir photo ci-dessous , tiré par David pour ses 40 ans]

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Le rêve d’Angèle serait de chasser un jour un aussi beau cerf que celui tiré par son père pour ses 40 ans !

Hugo, 12 ans, fils aîné de Charles : « J’ai trois rêves. Le premier est de devenir champion du monde de Ball-Trap. Le deuxième est de faire équipe avec tonton, papa et papi… s’il peut encore. Et le troisième est de devenir encore plus fort que papa ; d’avoir plus de titres. » Rendez-vous est pris.

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Hugo, 12 ans, une graine de champion qui, sous le regard bienveillant de Charles son père, pourrait bien un jour le surpasser.