De retour des JO, Éric DELAUNAY se livre

De retour des JO, Éric DELAUNAY se livre
Crédit photo : FFTir/KMSP

Les 25 et 26 juillet derniers à Tokyo, Éric DELAUNAY a tenu en haleine des français qui voyaient en lui un espoir de médaille. Finalement, après la déception, le rêve est maintenu pour Paris 2024.

Propos recueillis par Frank TISON.

Frank TISON : Éric DELAUNAY, les chasseurs vous ont découvert à Tokyo. Vous aviez derrière vous tous les habitants de Bréville-sur-Mer, de la Manche et de la France. Pourquoi cette défaite en finale ?

Éric DELAUNAY : Évidemment, j’aurais du décrocher une médaille et j’ai laissé passer ma chance. Dommage vis-à-vis de tous ceux qui m’ont découvert, suivi et encouragé. J’ai réussi un record olympique aux éliminatoires avec 124/125 mais cette finale hors norme m’a surpris, et notamment les nouveaux doublés inversés des postes 3-5-6 que l’on ne tire malheureusement qu’en finale. Ces doublés très difficiles ont été mis en place à Rio et nous ne les pratiquons que trop rarement.

FT : Vous n’étiez pas entraîné à cette finale difficile ?

ED : J’ai beaucoup travaillé le mental et la sophrologie car ce sport l’exige en grande partie. Je pensais être suffisamment entraîné pour la finale, mais visiblement je ne l’étais pas. Je dois me résoudre à accepter mon erreur et continuer de travailler. J’étais entraîné techniquement et mentalement pour remporter les éliminatoires, mais pas pour remporter cette finale. C’est un second concours, très différent du premier.

FT : Vous avez terminé 7ème à Rio, 5ème à Tokyo… quelle place pour Paris 2024 ?

ED : La logique dirait 3ème… mais j’aimerais faire mieux. Il faut aller toujours au bout de ses rêves. C’est un message fort que je veux faire passer à tous les jeunes qui comme moi ont des rêves olympiques. Foncez, travaillez dur et donnez-vous les moyens de réussir ! Et prenons rendez-vous tous ensemble pour Paris 2024 !

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Le Skeet est une discipline sportive olympique qui exige de tirer une ou deux cartouche en quelques dixièmes de seconde, sur des plateaux qui volent à 120 km, en partant désépaulé.

FT : Pourquoi tirez-vous au Skeet ?

ED : Mon père était armurier à Saint-Lô et tenait le stand de Ball-Trap de la Meauffe. En 2005, mon père a pris sa retraite et le stand a malheureusement fermé pour nuisances sonores. Comme installations, il y avait un Skeet, une Fosse américaine et deux Compak Sporting. À 5 ans, je tirais des « rabbits » à la hanche et des marks sortant du poste 6 du skeet avec une carabine 12 mm. À ma première communion, j’ai reçu un calibre 28. Vous comprenez que je suis tombé dans la marmite de la chasse et du tir tout petit. J’ai débuté au Parcours de Chasse mais me suis vite intéressé à l’olympisme, cela représentait mon rêve de jeunesse. J’ai toujours aimé cette école de l’épaulé parfait, de la perfection gestuelle, de la visée précise et du lâché en moins de six dixièmes de seconde.

FT : Parlons technique. Combien de cartouches tirez-vous ? Quel fusil, quelle longueur de canons et quels chokes ?

ED : Je brûle chaque année 50.000 cartouches mais certains en tirent 100.000, comme le koweïtien médaillé de bronze Abduhllah AL-RASHIDI. Je suis sponsorisé par BERETTA depuis 2011 et tire avec un DT 11 Black équipé d’une crosse TSK à compensateur. Les canons font 76 cm, l’inférieur est lisse et le supérieur ¼ choke (2/10ème). L’âme fait 18,6 mm. Le poids du fusil est de 3,650 kg dont 1,420 kg pour les canons. Nous utilisons des 76 cm au Skeet de compétition depuis les Jeux olympiques de Rio 2016 car le nouveau règlement y avait exigé le tir de doublés difficiles aux postes n°2-4 et 5.

FT : Quel est votre métier pour vous permettre de voyager et tirer à longueur d’année ?

ED : Je suis professeur de sport auprès du Ministère des sports. J’ai obtenu ce poste aidé par la FFTir et l’ONISEP (Office National d’Information Sur les Enseignements et les Professions). Je suis cadre de catégorie 1 détaché à 80% de mon temps au tir de compétition. J’ai été titularisé le 1er janvier 2017, et cette date a changé ma vie et ma perception du tir au haut niveau. Avant Rio, j’étais simple sportif amateur, ex-vendeur de chaussures au chômage. Je le dis sans honte. Depuis, j’ai l’esprit libre et mes résultats sportifs s’en ressentent. Je suis également soutenu par ma région, la Communauté de communes et de nombreux commerçants de Saint-Lô. C’est très gratifiant.

FT : Que pensez-vous du champion olympique Vincent HANCOCK ?

ED : Le titre olympique de Skeet est revenu à mon ami américain Vincent HANCOCK. C’est un immense champion que j’apprécie beaucoup. Il est excellent dans toutes les disciplines ; il a par exemple obtenu des titres au Parcours de Chasse aux USA. Déjà sacré champion olympique de Skeet en 2008 à Pékin, en 2012 à Londres, il signe un nouveau titre avec en plus un record olympique en finale (59 sur 60). Chapeau bas, Vincent !

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L’américain Vincent HANCOCK est un immense champion qui a confirmé sa supériorité en remportant trois fois l’or des quatre dernières olympiades de Skeet Olympique.

RÉSULTATS TOKYO - 25 JUILLET 2021

Finale Skeet Olympique homme – Stand d’Asaka au Japon

1/ HANCOCK Vincent – USA (122 aux éliminatoires + 59 en finale)

2/ ANSEN Jesper – Danemark (122 + 55)

3/ AL-RASHIDI Abdullah – Koweït (122 + 46)

4/ KALLIOINEN Eetu – Finlande (123 + 36)

5/ DELAUNAY Éric – France (124 + 25)

6/ CASSANDRO Tammaro – Italie (123 + 16)

Retrouvez l’interview d’Éric DELAUNAY avant son départ pour les JO.