À l’approche des brocards, les « kojo » polonais

À une époque où les conditions sanitaires le permettaient, nous avons fait l’ouverture du brocard en Pologne. Notre approche réalisée dans la région de Grande Pologne, eut pour guide Maïka, une impénitente chasseresse.
Maïka dirigeait alors sa propre agence de chasse. À l’heure actuelle, elle continue à pourvoir quelques chasseurs « en séjours sur mesure ». Ce soir le vol LH1636 en provenance de Munich nous dépose à Poznan, la capitale de Grande Pologne, elle est l’une des 16 régions du pays. Demain, le 9 mai sera un rendez-vous sacré pour les disciples de Saint-Hubert, celui de l’ouverture du brocard. Comme fondue au milieu des sculptures féminines polychromes de l’aérogare de Ławica, nous reconnaissons une jeune femme blonde bien réelle. En notre for intérieur sourd un refrain de Gilbert BÉCAUD, le prénom de Maïka y remplace celui de « Nathalie, mon guide ».

DEMAIN, C'EST L'OUVERTURE DU BROCARD
Grâce à son entregent les formalités administratives des armes sont expédiées. Rapidement sa VW prend la direction de la ville de Pila vers le nord. Tout au bonheur de nous retrouver, la discussion va bon train, entre colzas en fleurs et blé en herbe. Ce vol d’oies ou ces cigognes à l’affût de quelques grenouilles nous rappellent que la Pologne est le premier site de nidification en Europe. « Dans cette région, mon grand-père maternel, qui n’était ni communiste, ni apparatchik, faisait chasser la Nomenklatura. Je te montrerai une photo sur laquelle j’apprends à faire de la bicyclette dans sa maison forestière. » La route déploie son ruban flambant neuf à travers la campagne, au bord duquel, les pittoresques petits vendeurs de légumes, de fleurs et de champignons d’antan, ont disparus.

LES CLUBS COMMERCIALISENT UNE PARTIE DE LEUR PLAN DE CHASSE
Krajenka, la pancarte du village s’efface dans le rétroviseur. La suivante indique « Grandel Piła » ; nous franchissons le magnifique porche en bois sculpté du club de chasse qui nous reçoit. Souvent abusivement nommés, « clubs privés », par les chasseurs français, la chasse en Pologne est en fait régie par des associations. En France, elles s’apparenteraient au type « loi de 1901 ». Quant à lui, l’équivalent de notre ONF, appelé LP en Pologne, leur attribue des surfaces allant de 3000 à 30.000 hectares. Ainsi, Grandel Piła gère 17.000 hectares. C’est pour subvenir aux dédommagements des dégâts occasionnés par les grands animaux, que les clubs commercialisent une partie de leur plan de chasse. Ce matin, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne, Przemek un géant débonnaire, nous abandonne au beau milieu d’une pinède. Aujourd’hui, Maïka a décidé que nous partagerions ensemble sa Pologne peut être la plus intime. Pourtant, dans son catalogue personnel, elle a sélectionné plus de cent territoires de chasse. Mais celui-ci est marqué par l’ombre du souvenir de son grand-père tué à la guerre.

À L'INSTANT DU DOIGT SUR LA DÉTENTE
Sous ces frondaisons d’où exhale la résine, elle a également tué son premier chevreuil. Vingt ans plus tard, presque jour pour jour, « l’émotion ressentie lors du tir de cet animal à 180 mètres avec ma carabine fétiche demeure intacte. Celle qui vous comprime la poitrine, à l’instant du doigt sur la détente. Elle ne connait pas de frontière, pour avoir également éprouvé cette même décharge d’adrénaline avec mon premier caffer-caffer au Mozambique. » Pourtant, Maïka est experte en matière de sensations fortes. Qu’il s’agisse d’effectuer une plongée au beau milieu d’un océan infesté de requins ; ou bien encore quelques figures de voltige aux commandes de son Cap 10, ses autres passions

LES BROCARDS REFUSENT LES AVANCES PLAINTIVES DE L'APPEAU
Pour l’heure, il en va tout autrement et les brocards refusent catégoriquement de céder aux avances plaintives de l’appeau de notre chasseresse. Nous n’arrivons pas, non plus, à surprendre la moindre tache rouge d’un pelage au détour d’une allée. Quand, en milieu de matinée, tandis que nous débouchons sur une petite clairière un premier aboiement rageur se fait entendre. Même si l’auteur de cette alerte demeure invisible, l’espoir renaît. Comme jamais, Maïka vérifie avec sa poire à poudre la direction du vent capricieux, avant de poursuivre sa quête, jumelant sans répit. Maintenant, les animaux de retour du gagnage alentour semblent avoir rejoint le fort de la pinède pour leur reposée diurne. Le grand brocard entraperçu et approché à pas de loup reste sur l’œil. Insaisissable ! Par trois fois, Maïka déploiera son trépied sans finalement pouvoir tirer…
LES FRAIS DE « LA RAPIÈRE FOUDROYANTE »

Le crépuscule verra s’établir une stratégie différente, quand assis côte à côte dans un mirador pendant de longues minutes nous observerons un lièvre en goguette, puis la cour d’un jeune brocard à sa chevrette. Selon l’expression d’HEMINGWAY parlant du tir à balle, le chevreuil fera les frais « de la rapière foudroyante » de Maïka. Quant à moi, ce sera l’expérience piquante d’un hallier d’épines noires polonaises, quand, non loin du tir, il s’agira d’extraire l’animal du tombeau qu’il choisit.

Przemek aussitôt accouru au son du canon, fidèle à la tradition germanique, présente aussitôt à Maïka, par l’entremise de son couvre-chef, un rameau humecté du sang de « kojo » : « Waidmannsheil ! – Waidmannsdank ! ».

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