Jean-Louis LIÉGEOIS, une vie à « voler »

Jean-Louis LIÉGEOIS, une vie à « voler »

La chasse au vol est un mode de chasse encore confidentiel en France et méconnu des autres chasseurs. Chasser avec un oiseau de proie est un véritable défi et exige du temps, de la précision et beaucoup de passion. Jean-Louis LIÉGEOIS est l’un de ces passionnés qui a longtemps œuvré pour le spectacle de fauconnerie du Puy du Fou.

UN PIONNIER PARMI LES FAUCONNIERS

Il fut l’un des pionniers parmi les fauconniers à chasser avec un aigle en France. Partons à la rencontre de ce personnage singulier, toujours partant pour partager sa passion et initier les novices, et qui, vous allez le constater, est tombé dedans quand il était tout petit. Vers l’âge de 6 ans, un voisin a trouvé dans son jardin un bébé milan royal tombé du nid. « Je vivais alors en Lorraine dans le bassin de Briey, dans les mines de fer. De grandes forêts entouraient notre maison. Je l’ai élevé pendant deux ans avec l’aide d’un grand oncle qui était bûcheron. Il m’a dit quoi lui donner à manger, comment le garder en bonne forme ».

Jean-Louis LIÉGEOIS, une vie à « voler » : photo 2
Les jets (liens de cuir) n’entravent pas le vol du rapace en chasse.

UN FAUCON LAGGAR POUR DÉBUTER

« Deux ans plus tard, je le laissais voler libre plusieurs heures par jour. Un soir, il ne rentra pas, il venait d’être tué par un autre voisin qui a eu peur de l’oiseau. Par la suite, vers 12-13 ans, chaque année au début des grandes vacances, je dénichais une buse que j’élevais pendant les deux mois libres. Puis à la rentrée, je la relâchais dans la nature. Professeur de sport au sein de l’armée française, en poste en Allemagne, près de Fribourg en Brisgau, non loin de Colmar, j’ai rencontré, un allemand qui m’a guidé dans tout mon apprentissage de la fauconnerie, et qui m’a un jour confié un faucon laggar pour débuter. »

Jean-Louis LIÉGEOIS, une vie à « voler » : photo 3
Lors de la battue, l’aigle reste au poing, attendant d’être libéré pour fondre sur sa proie.

UN PREMIER AIGLE À 18 ANS

« C’est à l’âge de 18 ans que j’ai acheté Ara, mon premier aigle, pour la modique somme de 6109 Deutsche Mark, ce qui représentait à l’époque un mois et demi de salaire. Placée chez un ami fauconnier, je passais tout mon temps libre avec elle. Depuis je n’ai jamais cessé de chasser au vol avec un aigle. C’est avec Ara que j’ai intégré l’Association Nationale des Fauconniers et Autoursiers Français ANFA. Je me souviens encore de la première réunion nationale, où les lièvres giclaient de chaque betterave. Ara, courageuse mais inexpérimentée, les entreprenait tous, mais sans succès. Les années suivantes elle devint plus performante, mais après dix ans à mes côtés, elle succomba à une péricardite ».

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Jean-Louis LIÉGEOIS, une vie à « voler » : photo 5
Le chaperon ne sera enlevé qu’au moment de quitter le poing.

UN AIGLE COURONNÉ

« Après Ara, j’ai eu un temps sans oiseau, ce qui m’a aigri quelque peu. Un peu plus tard dans ma vie, j’ai quitté l’armée pour entrer dans les forêts et leur gestion. J’y ai trouvé un équilibre et une belle vie. Je « volais », à ce moment, un aigle couronné acheté à un fauconnier belge qui, se voyant vieillir, préféra arrêter. Cet oiseau magnifique n’a pas les qualités de vol de l’aigle royal, mais son étrangeté le rend particulièrement spectaculaire. Son humeur se manifeste par un hérissement des plumes qui lui entourent le cou et la tête, d’où son nom ».

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Les serres puissantes de l’aigle nécessitent un gant de cuir épais et résistant.

LE ROCHER DES AIGLES DE ROCAMADOUR

Jean-Louis LIÉGEOIS est ensuite entré au Rocher des aigles de Rocamadour comme fauconnier professionnel, faisant ainsi de sa passion de toujours, son métier. En 1993, il intègre le Puy du Fou, où la direction lui confie le désormais célèbre spectacle des oiseaux. « C’est là que j’ai pu concrétiser mon intention première, qui était la conservation de la nature. Leur prodigieuse collection de rapaces m’a permis de côtoyer les plus hautes instances de la zoologie mondiale. Les résultats spectaculaires que nous avons obtenus nous ont placés en tête des centres spécialisés dans la reproduction des rapaces ».

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LE PUY DU FOU

« Le Puy du Fou m’a fait confiance tout au long de ma carrière. Je lui ai apporté tout mon être et toutes mes tripes, et aujourd’hui c’est devenu l’une des plus grandes collections au monde, et sûrement le plus beau spectacle ». Pendant toutes ses années de fauconnier professionnel, Jean-Louis continue, bien sûr, de pratiquer la chasse au vol, toujours dans la transmission, l’envie et ce besoin de partager sa passion et son expérience. Ainsi, il crée en 1994 l’équipage du Mont des Alouettes qui, fort de plus de vingt membres, est l’un des plus actifs de France.

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Le rapace sait qu’au creux du gant se trouve toujours une récompense.

L’ÉQUIPAGE DU MONT DES ALOUETTES

Côtoyer les aigliers, autoursiers* et fauconniers, lors d’une journée de chasse est toujours un grand moment. On y retrouve l’essence même d’une chasse plaisir, d’une chasse de passionnés, jamais avares d’explications sur leurs oiseaux ou sur la pratique de l’affaitage, loin de toute notion de gestion ou de régulation, du fait de leurs faibles prélèvements. Les voir prendre leur envol à la poursuite d’un lièvre ou d’un chevreuil nous ramène à des temps anciens, et à une pratique épurée de la chasse.

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Œil vif et perçant, bec puissant, l’aigle possède toute la panoplie du prédateur.

La beauté de ces rapaces aux becs puissants, aux serres acérées et aux regards glacials et intenses qui vous transpercent, n’a d’égale que la passion des hommes qui les accompagnent, Jean-Louis Liégeois étant l’un de leurs plus brillants représentants.

* Chasseur au vol chassant avec un autour des palombes (rapace ressemblant à un gros épervier).